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25 mars 2015

Se souvenir d'Adrienne Bolland

Dans un ouvrage qui fera date, Martine Laporte fait revivre Adrienne Bolland, une femme au caractère bien trempé, qui ne s’encombrait pas des convenances. Sa traversée de la Cordillère des Andes aux commandes d’un Caudron G3 (1921) ne fut pas le premier, ni le dernier de ses exploits aériens. Révélé en avant-première lors de la Soirée des femmes dans l’aviation, le 6 mars dernier dans les locaux de l’Aéro-club de France, par son auteure qui a fait une conférence remarquée sur son héroïne, ce livre, je le déclare d’emblée, mérite l’un des prix littéraires de l’aéronautique tels que diverses entités en décernent chaque année ! Car il réunit toutes les qualités pour cela. Martine Laporte, pour rendre un juste et vibrant hommage à Adrienne Bolland, s’est faite chercheuse – logiquement jusqu’en Amérique du Sud –, écrivaine, metteuse en page (encore un domaine où elle a parfaitement réussi son coup) et éditrice (mais là encore, elle n’en était pas à son coup d’essai). Le résultat est un ouvrage très attrayant, à la limite du « beau livre » tant les photos sont de qualité et bien mises en valeur, une biographie passionnante dédiée à un personnage ô combien romanesque. On peut se demander pourquoi « la déesse des Andes », ainsi qu’elle fut surnommée avec déférence par les Sud-Américains, n’a pas préalablement fait l’objet de récits de l’aventure de sa vie. Sans doute son caractère était-il un peu « difficile » – disons qu’elle ne s’en laissait pas compter, et qu’elle n’hésitait pas à employer un langage châtié, y compris avec des gens hauts placés, au grand dam d’eux ou de leur entourage – au moins son caractère était-il bien trempé ! Son exploit du 1er avril 1921, lorsqu’elle franchit les Andes, reliant l’Argentine au Chili à bord d’un frêle biplan Caudron G-3, un modèle certes éprouvé durant la Grande Guerre, mais bien peu puissant pour ce genre de raid, a passablement éclipsé d’autres hauts faits : traversée de la Manche par une météo erratique, record féminin du nombre de loopings, des dizaines de meetings à son actif avec son propre « cirque aérien », constitué de son mari et ses trois avions… La militante féministe aussi, usant de sa célébrité pour lutter en faveur de l’émancipation de la condition féminine, ou encore la résistante durant l’Occupation ; tout cela constitue le portrait d’une dame charismatique, engagée mais libre, dotée d’une volonté de fer (elle disait souvent avoir eu peur en vol…), quelqu’un de véritablement hors normes, surtout replacée dans le contexte de son époque, même si on l’a appelée « les Années Folles ». Artifice de style, Martine Laporte, après une préface de Marie-Vincente Latécoère, a choisi de se mettre dans la peau de son personnage, comme si c’était Adrienne Bolland elle-même qui avait rédigé ses mémoires. On s’y laisse prendre. L’aviatrice se livre (son addiction aux courses hippiques, la bravade qui l’a conduite à embrasser la carrière d’aviatrice, etc.), confesse ses émotions parfois, et promène le lecteur dans les méandres de sa vie, dont elle ne révèle que ce qu’elle veut bien révéler. Mais le résultat est un véritable roman illustré dans un volume de 198 pages au format original (22 x 27), imprimé sur un beau papier de fort grammage, qui valorise aussi une iconographie de belle tenue (photos évidemment, cartes, coupures de presse, mais aussi dessins originaux de l’artiste Bernard Lengert, réalisés spécialement pour « coller » au récit). De la belle ouvrage.

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